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Apprendre au chien
à renoncer

(à un objet d'intérêt)

      Votre chien ramasse n'importe quoi en balade et se sauve quand vous voulez l'empêcher de le manger ? Il vole sur la table ou saisit la moindre opportunité de chaparder quelque chose que vous faites tomber (nourriture, chaussette, jouet) ? Ou tout simplement, vous avez un chiot et aimeriez prendre les devants pour que ce genre de choses n'arrivent pas ? Cet article peut vous aider à enseigner à votre chien comment agir autrement sans se sentir lésé ou en conflit avec vous.

     C'est également un exercice d'auto-contrôle parfait ; autrement dit, il apprend à votre chien à gérer ses émotions, à proposer des attitudes calmes quand il désire quelque chose. Cela pourrait vous éviter de vous retrouver pendu au bout de votre laisse avec un chien qui tire comme un forcené car il a vu un congénère ou des enfants jouer au ballon, par exemple.

edit sept. 2022 : la technique et les étapes que je propose dorénavant sont un peu différentes, pour faciliter le travail du chien et lui éviter de ressentir une frustration non nécessaire à l'apprentissage. Si cela vous intéresse, l'exercice est largement développé dans notre livre Le Refus de l'obéissance aveugle et du contrôle permanent.

      Pour commencer, surtout si le chien est très gourmand et/ou peu branché sur l'humain, on peut mettre des friandises hors d'accès (très en hauteur ou dans une boîte bien fermée) et laisser le chien se rendre compte qu'il ne peut pas les obtenir en s'excitant devant. Il faut sauter sur l'occasion pour le récompenser quand il renonce (se détourne, s'assoit, vous regarde éventuellement). L'idée, c'est de lui faire comprendre que vous êtes la solution quand il veut de la nourriture (ou un jouet) et qu'on ne se sert pas seul.

      On peut également entamer l'apprentissage en amenant une main fermée, contenant des croquettes, sous le nez du chien. Ce dernier va la sentir, la lécher, la pousser de la patte, peut-être essayer de la mordiller (s'il fait mal, on évitera de commencer par cet exercice). Ce qu'on guette, c'est le moment où le chien abandonne, arrête de s'obstiner sur la main et propose autre chose, comme un assis, un regard vers vous, ou simplement de tourner la tête dans une autre direction. On récompensera immédiatement cette attitude avec l'autre main (et des friandises de meilleure appétence si possible). L'exercice se répétera tant que le chien aura un élan vers cette main fermée. Quand il ne fera que la regarder sans faire mine de s'en approcher, on pourra corser en ouvrant la main, ce qui devrait l'inciter à ravancer vers elle. On refermera évidemment de suite, pour indiquer que ce comportement n'est pas le bon, donc le chien renoncera - s'il a bien compris l'étape antérieure. Une fois que le chien délaisse sans problème la nourriture dans une main ouverte, on peut passer aux étapes suivantes.

 

Technique 1 : Assez longue mais ludique

  • Se munir de croquettes (habituelles, dans un bol) et de friandises beaucoup plus goûteuses ; les secondes serviront de récompenses tandis qu'on posera les premières en « appât », comme dans le point précédent.

  • Mettre le chien en laisse dans la maison - ou le jardin si le chien sait se concentrer en extérieur.

  • Poser le bol, suffisamment loin : le chien doit le voir, va vouloir aller manger les croquettes, mais ne pourra pas le faire puisque la laisse le retiendra. Le but n'est pas que le chien se retrouve en grande difficulté face à une frustration trop importante, donc il convient d'adapter la distance pour que le chien regarde l'appât sans avoir envie de tirer comme un fou dans sa direction et sans gémir ou aboyer. Ce qu'on veut, c'est que le chien puisse observer la scène en étant capable de se retenir, ce qui lui vaudra des récompenses pour son calme et sa décision de ne pas tirer. Sur un chien posé, on peut même attendre que le chien se tourne carrément vers nous pour avoir droit à sa friandise. A vous de juger selon sa facilité/difficulté de concentration pour éventuellement réadapter la distance entre le chien et la nourriture au début.

  • Lorsque le chien se tourne de suite vers vous (ou attend sagement en s'asseyant par exemple) alors qu'il voit les croquettes au sol, on peut progressivement se rapprocher, jusqu'(à ce que le chien soit à portée mais renonce malgré tout à se saisir de l'appât, sans ordre évidemment.

  • Essayer sans bol, les croquettes étant directement posées au sol.

  • Ensuite, on pourra ramasser une des croquettes et la faire tomber à 10-20cm du sol, devant le chien (attention, le mouvement ravive l'intérêt ; il faut être prêt à retenir avec la laisse). Qui peut le plus peut le moins ! Si votre chien ne cherche pas à se saisir de ce qui bouge, il y aura très peu de chance pour qu'il aille chercher de la nourriture immobile, qui plus est sur la table (et cela lui apprend également à ne pas réagir à tout mouvement par la poursuite, comme sur un enfant en train de courir ou même un chat - avec du travail).

  • Augmenter la hauteur pour faire tomber la croquette (on récompense à chaque non réaction) puis tenter de faire tomber deux puis trois croquettes avant de récompenser.

  • Même chose sans laisse ! Voir pour une transition avec une cordelette accrochée tenue puis non tenue éventuellement.

  • Quand le chien ne s'intéresse plus du tout à ce qu'il y a sol, que ce soit posé ou lancé, voire lancé sur lui, on peut recommencer avec de la nourriture plus appétente. Retour à la case départ ! N'attendez pas de lui qu'il maîtrise l'exercice comme avec les croquettes. A cette étape, pour récompenser, on peut jouer sur la quantité plutôt que sur la qualité : si tu laisses le morceau de jambon au sol, tu auras plein de petits bouts (les chiens font très bien la différence au niveau des quantités).

  • Essayer de s'éloigner, de faire mine de ne pas surveiller les appâts et toujours récompenser quand le chien décide de ne pas toucher (ou vous suit).

  • Mettre le chien en conditions réelles, dans la maison puis en extérieur : avoir posé un appât au sol à un endroit stratégique pour vous - hors vue du chien isolé ailleurs - et passer avec lui à côté ; il devrait choisir de ne pas aller ramasser la nourriture. On peut remettre la laisse sur les premiers passages qu'on fera, pour éviter l'échec.

 

Avantages : le chien réfléchit et apprend à se tourner vers l'humain quand il est en difficulté et pour avoir accès à la nourriture + rien de trop fatigant physiquement pour l'enseignant.

Inconvénients : besoin d'être patient sur la première phase, surtout si le chien est déjà adulte ou a déjà pris l'habitude de voler + étape de plus à travailler car le chien sait faire la différence quand il est en laisse ou pas ; il sera donc plus dur de faire sans et de s'éloigner, dans un premier temps.

Technique 2 : avec intervention humaine physique pacifique

  • Mêmes « ingrédients » mais pas de laisse

  • Avant, j'optais pour un « non » franc quand le chien s'approchait de la nourriture, mais cela fonctionne surtout sur un tout jeune chien ; des ados bourrins et gourmands ont du mal à être arrêtés par cette simple interdiction. Puis cette méthode ne vous conviendra pas si vous ne souhaitez pas dire « non » dans un apprentissage - ou si, comme moi à présent, ce mot n'est pas du tout synonyme d'une interdiction. Cette façon de procéder implique aussi et surtout une pression qu'on met sur le chien et qui rend, à mon sens, l'enseignement plus fragile car le chien n'aura jamais fait le choix de ce comportement lui-même ; il aura simplement obéi à une demande. J'ai donc opté pour le barrage physique : je défends les friandises au sol avec mes jambes en faisant blocage aux approches du chien, sans rien dire, toujours, et au besoin, je mets le pied sur la ou les croquettes pour la/les protéger, toujours le temps d'attendre que le chien renonce à essayer de s'en saisir.

NB : si vous avez travaillé en amont avec les friandises dans la main ou dans une boîte fermée qu'on finit par ouvrir sans que le chien ne s'intéresse à son contenu, il n'y aura certainement pas à défendre les récompenses mises au sol.

  • Pour le reste, c'est le même principe, on fait du graduel : on rapproche les friandises du chien, on met du mouvement, on s'éloigne des croquettes à « défendre », progressivement, puis on augmente l'appétence, avant de changer de milieu de travail puis de faire des simulations en extérieures (en ayant par exemple posé sur votre itinéraire de balade quelques friandises sur la route).

  • Dans la dernière étape, avec le chien en mouvement, passant près du "piège" posé, le mieux est de placer quelqu'un qui viendra bloquer l'accès à la nourriture si le chien ne prend pas la bonne décision.

 

Avantages : plus rapide + chien déjà libre donc déjà en situation de la vie de tous les jours face à la nourriture à ne pas toucher

 

Inconvénients : la « danse » du début peut-être fatigante pour l'humain et il faut avoir les bons réflexes pour que le chien ne puisse pas ramasser les friandises au sol.

 

      Dans les deux cas, il sera pratique de mettre un mot sur ce comportement. Mais tardivement ! Il est préférable d'attendre que le chien ait compris qu'il ne faut pas toucher ce qu'il y a au sol pour accompagner vos récompense d'un « oui, tu laisses/pas toucher ». Le dire avant, c'est potentiellement parasiter la compréhension du chien – voire s'exposer à des ratés récompensés vocalement.

      Point encore plus important : si vous souhaitez travailler les auto-contrôles du chien et non pas votre contrôle sur ses actions, demander de laisser ne permettra jamais à votre chien d'apprendre à renoncer de lui-même.

       Prenez garde à ne pas brûler les étapes ; vous risquez de mettre votre chien en échec (il va pouvoir se saisir de ce qu'il y a au sol si vous avez un mauvais réflexe en vous éloignant trop vitre, trop loin à un moment donné) et vous risquez de renforcer aléatoirement ce « vol » en fonction des situations.

      A la fin de l'exercice, pour marquer le coup, on ramasse les friandises au sol nous-mêmes et on les donne toutes (ou presque) au chien en apprentissage ; il saura rapidement qu'en plus d'être récompensé de ne pas les toucher pendant la phase d'exercice, il y aura droit quand il sera terminé et sera d'autant plus disposé à les laisser en place.

 

Attention : quoi qu'il en soit, vous apprenez à votre chien, ce faisant, à ne pas toucher de la nourriture au sol DONC il sera absolument interdit de ramasser quoi que ce soit au sol dorénavant (sauf jet volontaire de friandises en tant que récompense: et bien annoncé comme tel) même si c'est comestible, même si vous comptez donner ce qui est tombé alors que vous cuisiniez par exemple, c'est TOUJOURS l'humain qui récupère et qui donne (ou pas).

 

      Parallèlement, on peut travailler selon la méthode de Cynotopia : chien en laisse – ou sans, si votre chien la maîtrise parfaitement et que vous savez qu'il restera auprès de vous – on fait de la marche au pied, suffisamment loin d'une gamelle pleine de croquettes. La distance, c'est le chien qui la décide : il doit savoir qu'elles sont là, pouvoir les regarder, mais renoncer à s'en approcher sans être tracté et se reconcentrer de lui-même sur la petite marche au pied, et donc son maître. Les récompenses tombent dès que le chien se reconnecte à l'humain. Le but sera de s'approcher de plus en plus de la gamelle, jusqu'à ce que le chien ne la regarde même plus alors qu'elle est juste à ses pieds.

 

 

     Ces techniques sont déclinables pour tout ce qui attire le chien : jouets à ne pas voler aux enfants, chaussures, chaussettes etc. ou même ses jouets, s'il a du mal à se contrôler dans le jeu et à tendance à bondir sur vous pour s'en saisir ou à choper un bout de bras au passage... L'important est d'avoir toujours pour récompenser quelque chose de plus haute valeur que ce qui attire l'animal en temps normal. Mais la démarche reste la même :)

Je vous laisse avec Roy et Pluton en images,

un chiot et un jeune chien m'ayant permis d'illustrer mon propos

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